5/8/2025
Probiotiques, prébiotiques, symbiotiques et postbiotiques – Le microbiote au cœur de la santé
Nous vivons avec eux depuis toujours. Invisibles à l’œil nu, des milliards de micro-organismes peuplent notre corps, principalement notre intestin. Ce microbiote, longtemps négligé, est aujourd’hui reconnu comme un organe à part entière, influençant notre digestion, notre immunité, nos émotions et même certains paramètres métaboliques. Face à l’explosion des maladies chroniques, des troubles digestifs, du stress ou de l’obésité, la science se tourne vers ces partenaires microscopiques.
Mais comment agir sur ce microbiote ? C’est là qu’entrent en jeu les biotiques – un ensemble de substances ou micro-organismes capables de moduler notre flore intestinale. On distingue quatre grandes catégories : les probiotiques, les prébiotiques, les symbiotiques et les postbiotiques. Chacune possède ses propres spécificités mais toutes visent à renforcer notre santé en entretenant une relation harmonieuse avec nos bactéries intestinales.
Le concept de biotiques va bien au-delà des simples compléments alimentaires. Il s'agit d'une approche globale de la santé fondée sur le dialogue entre notre organisme et les microbes qui y résident. Selon l’ISAPP (International Scientific Association for Probiotics and Prebiotics), chaque type de biotique est défini par son mode d’action, sa nature et ses répercussions documentées sur la santé de l’hôte.
Les biotiques ne se limitent plus à la sphère digestive. Aujourd’hui, ils trouvent leur place dans des domaines variés tels que la santé mentale, la santé cutanée, la fertilité, la ménopause, l’immunité, la performance sportive et même la santé animale. Cette transversalité reflète une conviction croissante : prendre soin de son microbiote, c’est prendre soin de sa santé globale.
Les probiotiques sont probablement les biotiques les plus connus du grand public. Ce sont des
« micro-organismes vivants, majoritairement des bactéries ou des levures, qui, lorsqu’ils sont administrés en quantité adéquate, apportent un bénéfice sur la santé de l’hôte ».
Cette définition, validée par l’ISAPP, met l’accent sur deux conditions essentielles: la viabilité des souches jusqu’à consommation et la preuve scientifique d’un effet.
Contrairement à une idée reçue, la plupart des probiotiques ne s’installent pas durablement dans l’intestin. Ils traversent le tube digestif et Interagissent de manière transitoire avec nos cellules intestinales, notre système immunitaire ou d’autres microbes. C’est dans ces interactions temporaires que résident la majorité de leurs effets bénéfiques : ils peuvent, par exemple, renforcer la barrière intestinale, moduler la réponse immunitaire ou réduire les inflammations locales. Cela dit, certaines souches peuvent, dans certains cas, parvenir à coloniser temporairement l’intestin en fonction du microbiote propre à chaque individu. C’est pourquoi une consommation régulière est souvent nécessaire pour maintenir leurs effets.
Le champ d’application des probiotiques s’est considérablement élargi. Des souches spécifiques sont utilisées pour prévenir les diarrhées associées aux antibiotiques, soulager les symptômes du syndrome de l’intestin irritable, atténuer les coliques du nourrisson ou réduire les symptômes d’anxiété légère. Dans ce dernier cas, on parle même aujourd’hui de « psychobiotiques », ces probiotiques capables d’agir sur l’axe intestin-cerveau.
Le marché est en plein essor : estimé à plus de 79 milliards de dollars en 2024, il se diversifie avec des formulations pour la santé féminine, la peau ou les animaux de compagnie. L’efficacité repose toujours sur des souches clairement identifiées.
À la différence des probiotiques, les prébiotiques ne sont pas des micro-organismes. Ce sont des substances alimentaires non digestibles (principalement des fibres), capables d’être sélectivement utilisées par certaines bactéries bénéfiques de notre microbiote ou par les probiotiques. Cette sélectivité est cruciale : une fibre n’est pas nécessairement un prébiotique, à moins qu’elle ait prouvé qu’elle favorise la croissance des souches bénéfiques.
Les effets des prébiotiques sont nombreux : amélioration du transit, réduction des inflammations, soutien immunitaire, meilleure absorption des minéraux, régulation de la satiété et du métabolisme glucidique… Ces effets passent par la capacité des microorganismes présents dans l’intestin à utiliser ces prébiotiques pour leur croissance et produire des composés bénéfiques comme les acides gras à chaine courte (acétate, propionate, butyrate…).
Parmi les prébiotiques les plus étudiés figurent les fructo-oligosaccharides (FOS), les galacto-oligosaccharides (GOS), l’inuline et les amidons résistants. Ces substances sont naturellement présentes dans des aliments tels que l’ail, l’oignon, les asperges, les topinambours ou la banane. Certains prébiotiques moins connus comme la fibre d’acacia ou le baobab sont aussi capables de stimuler la production d’acides gras à chaîne courte. Le lait maternel constitue aussi une source exceptionnelle de prébiotiques pour le nourrisson. Les oligosaccharides du lait humain (“human milk oligosaccharides” ou HMO), qui contribuent à l’installation d’un microbiote sain dès les premiers jours de vie, sont consommés par certaines souches de bifidobactéries pour se développer dans l’intestin du nourrisson.
Le marché est en forte croissance (+12,8%/an prévu jusqu’en 2032), porté par une demande pour des produits naturels, efficaces et bien tolérés, intégrés dans des aliments fonctionnels et boissons.
Les symbiotiques combinent dans une même formulation des probiotiques et des prébiotiques. Cette combinaison peut être conçue de deux manières :
Et leur effet combiné est supérieur à celui de chaque composant seul. Ce concept, redéfini par l’ISAPP en 2019, ouvre la voie à une nutrition ciblée, où les ingrédients sont sélectionnés non seulement pour leur efficacité individuelle, mais pour leur compatibilité microbienne. On peut citer la combinaison du HMO 2'-Fucosyllactose avec une souche spécifique de Bifodobacterium longum subsp. infantis BIO5478 qui améliore la santé intestinale et immunitaire des nourrissons.
Les symbiotiques sont particulièrement prometteurs dans les formulations destinées aux troubles digestifs chroniques, au soutien immunitaire, à la performance cognitive ou même à la beauté de la peau. La recherche explore aussi leur potentiel dans des domaines plus complexes comme l’autisme, la neuroinflammation ou les troubles métaboliques.
Les postbiotiques représentent la nouvelle génération de biotiques. Il s’agit de préparation de micro-organismes inanimés par tyndallisation (traités par la chaleur) et/ou de leurs composants structuraux ou métaboliques, qui conservent une activité bénéfique sur la santé de l’hôte.
Contrairement aux probiotiques, les postbiotiques n’ont pas besoin d’être vivants pour exercer un effet bénéfique. Ils peuvent contenir des cellules entières inactivées, des fragments cellulaires (parois, pili, protéines membranaires), ou d’autres composés bioactifs tels que des peptides antimicrobiens, des acides organiques, des enzymes ou des exopolysaccharides.
Leur intérêt est multiple : grande stabilité, sécurité accrue enlevée, compatibilité avec des matrices alimentaires variées, absence de risques infectieux chez les populations vulnérables. Ils sont particulièrement utilisés dans les soins de la peau, les formules pour nourrissons, la santé féminine ou encore l’alimentation animale (petfood).
Mais attention : tous les microorganismes inanimés ne deviennent pas des postbiotiques. Il faut prouver que la préparation – et non une simple souche – confère un bénéfice. Les études montrent, par exemple, que certaines souches inactivées peuvent réduire l’adhésion des pathogènes aux cellules intestinales ou vaginales, avec une efficacité comparable à celle des probiotiques vivants.
En effet, les souches Bioprox Lactobacillus plantarum BIO1096, L. crispatusBIO6272 et L. gasseri BIO6669, sous forme postbiotique (inactivées par la chaleur), ont démontré une réduction significative de l’adhésion de Candida albicans aux cellules épithéliales vaginales. Cet effet antagoniste s’explique en grande partie par leur capacité à occuper les récepteurs de liaison sur la surface des muqueuses, empêchant ainsi l’attachement des pathogènes.
Les biotiques représentent bien plus qu’une tendance. Ils incarnent une révolution dans la compréhension et la gestion de notre santé, en misant sur un acteur souvent oublié : notre microbiote. Chaque type de biotique – qu’il s’agisse de micro-organismes vivants, de fibres, de combinaisons intelligentes ou de souches inactivées – offre des solutions ciblées, documentées et accessibles.
Adopter une alimentation riche en fibres, diversifiée, incluant des aliments fermentés et/ou s’appuyer sur des compléments contenant des souches bien identifiées, est aujourd’hui une stratégie de santé durable. Dans un monde où les déséquilibres microbiens sont de plus en plus fréquents, les biotiques apparaissent comme des alliés essentiels… invisibles mais puissants.
Bibliographie
Intéressé par nos services ?